Dans le paysage en constante évolution de la mixologie, certains cocktails ont transcendé les tendances et résisté à l’épreuve du temps. Le dernier mot en fait partie. Cependant, l’avenir de cette boisson historique est désormais en jeu en raison d’un rebondissement inattendu : la pénurie de Chartreuse, l’un de ses ingrédients essentiels.

Pour le contexte, le Dernier Mot est un cocktail artisanal classique apparu avant la Prohibition et apparu pour la première fois sur un menu du restaurant. Club athlétique de Détroit bar en 1916. La boisson est souvent attribuée à l'artiste de vaudeville Frank Fogarty, connu pour son intelligence et son humour, et pour avoir de manière fiable « le dernier mot ». La boisson est une concoction apparemment simple, avec des parts égales de gin, de Chartreuse verte, de liqueur de marasquin et de jus de citron vert fraîchement pressé, mais le produit final est complexe, équilibré et vif. Chaque ingrédient du Last Word apporte ses propres qualités distinctives à la boisson. Cependant, le plus visible est sans doute le vert. Chartreuse , une liqueur aux herbes élaborée et produite par les moines chartreux depuis le XVIIIe siècle.

'La Chartreuse est ce qui apporte de la complexité [au dernier mot]', déclare Antony Crowther, gérant du bar de Le salon du dernier mot à Édimbourg, en Écosse. Il insiste sur le fait que le cocktail vaut la peine d'être bu. Du point de vue de Crowther, le Last Word est une boisson complètement différente sans Chartreuse.

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Les moines chartreux appartiennent à un ordre religieux de l'Église catholique dont le siège est dans les montagnes de Chartreuse en France, juste au nord de la ville de Grenoble. Au début du XVIIIe siècle, ils mirent au point un élixir composé d’une association de 130 plantes dans une base d’alcool de vin. Le résultat fut une liqueur aromatique jaune-vert avec un profil aromatique audacieux et herbacé et des notes épicées, sucrées et florales qui furent finalement connues sous le nom de Chartreuse verte.

À ce jour, les spécificités des ingrédients et des processus de Chartreuse sont gardées secrètes, ce qui ajoute au charme de la liqueur et à sa rareté actuelle. Les moines chartreux restent les seuls producteurs de Chartreuse, avec seulement quelques privilégiés en possession de la recette.

La popularité de la liqueur a fluctué au fil des ans, mais le mouvement des cocktails artisanaux du début du 21e siècle a encouragé son ascension. Par exemple, le Dernier Mot a été ressuscité par feu Murray Stenson au début des années 2000. Stenson était un barman renommé basé à Seattle qui a découvert la boisson dans un vieux livre de cocktails et l'a ajoutée à son menu. Le légendaire mixologue avait longtemps rejeté les cocktails agressivement sucrés des années 1970 et s'était plutôt concentré sur des boissons classiques avec des ingrédients de grande qualité – des libations dans la même veine du Last Word, qui s'est avéré être un succès. Aujourd’hui, ce cocktail relancé est considéré comme un classique, et de nombreux bars adoptent son nom ludique comme surnom de leur entreprise. Cela a contribué à faire monter en flèche la demande de Chartreuse.

Malgré sa popularité retrouvée, en 2021, les moines chartreux décident discrètement de limiter la production de Chartreuse. Peu à peu, les professionnels et les amateurs de spiritueux se sont rendu compte qu'une pénurie se profilait à l'horizon. En janvier 2023, la nouvelle a été rendue publique par une lettre annonçant la décision des moines de « protéger leur vie monastique et de consacrer leur temps à la solitude et à la prière ». Aujourd’hui, la Chartreuse est toujours en production, mais elle est plafonnée à environ 1,2 million de bouteilles par an. Pour les entreprises qui utilisent le Dernier Mot comme cocktail ou comme nom, la limite pose problème.

Bien que la décision des moines de limiter la production de Chartreuse n’ait pas encore eu d’impact sur le bar Crowther’s d’Édimbourg, il a observé que la pénurie a ironiquement « stimulé la popularité du Last Word et de la Chartreuse » parce que « c’est dans la nature humaine de vouloir quelque chose d’exclusif ».

Pour beaucoup d’autres, cependant, il a été difficile d’accéder à suffisamment de Chartreuse pour répondre à la demande. Matt Sanchez, copropriétaire de Le dernier mot à Huntington, New York, a fait remarquer que pendant un certain temps, ils utilisaient du Dolin Génépy dans leur cocktail homonyme au lieu de la Chartreuse verte. Dolin Génépy est semblable à la Chartreuse verte en ce sens que c'est une plante alpine liqueur , mais il a un profil de saveur plus subtil et un alcool plus faible, donc Sanchez et son équipe ont dû ajuster la recette en conséquence.

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De façon intéressante, La mouche , un bar de Brooklyn, New York, récemment ouvert c'est une version du Dernier Mot en pleine pénurie de Chartreuse. La directrice générale, Madison Fink, a expliqué que The Fly donne la priorité aux spiritueux locaux lorsque cela est possible et qu'il utilise des spiritueux fabriqués à Brooklyn. Face au centre de Ugly pour sa version de la boisson. Centerbe est « une version italienne de la Chartreuse, qui se traduit par « cent herbes » », dit Fink. L'utilisation de Faccia Brutto au lieu de Chartreuse permet à The Fly d'honorer la popularité du Last Word tout en restant aligné sur ses valeurs axées sur la communauté et a également dissipé toute inquiétude concernant les approvisionnements de plus en plus limités de la liqueur originale.

Que ce soit par choix (comme The Fly) ou par nécessité (comme Huntington's The Last Word), les bars à cocktails du monde entier ont choisi de remplacer la Chartreuse verte dans la boisson classique. Il reste encore à voir quel sera l’impact de la pénurie d’alcool historique sur l’héritage du Dernier Mot ; cependant, de nombreux professionnels du secteur soupçonnent que la Chartreuse est susceptible de devenir une liqueur de plus en plus convoitée, réservée aux occasions spéciales, avec des versions plus accessibles prenant sa place dans les boissons de tous les jours.

Alors, voyons-nous le dernier du Dernier Mot ? C’est douteux. Et avec l’essor de nouvelles liqueurs qui s’inscrivent dans la tradition de la Chartreuse verte, nous n’en verrons probablement pas la fin de si tôt.